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SECRET DES AFFAIRES : MODE D’EMPLOI

Publié le : 04/02/2022 04 février févr. 02 2022

Créé par une loi[1] de 2018, transposant une directive européenne[2], les dispositions relatives au secret des affaires ont été codifiées dans le code commerce aux articles L151-1 et suivants.

Dans le contexte actuel où les acteurs économiques sont de plus en plus exposés aux actes de concurrence, de malveillance et de prédation de leurs actifs immatériels, ce nouvel outil vient améliorer et permet de renforcer de façon simple la protection de leur patrimoine immatériel.
 

1. Le secret des affaires : qu’est-ce que c’est ?

Le secret des affaires est susceptible de protéger, entre les mains de son détenteur légitime, toute information, formellement exprimée, sous réserve de remplir 3 critères cumulatifs :

1er critère : Elle n'est pas, en elle-même ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d'informations en raison de leur secteur d'activité.

En clair, cela correspond à tout ce qui n’est pas connu du secteur d’activité examiné, cela entendu de façon très large puisque cela pourrait concerner, par exemple, et sans exhaustive : le savoir-faire commercial et toutes informations non divulguées s’y rapportant ; la stratégie commerciale ; un business plan ; les fichiers clients et/ou fournisseurs ; des données commerciales stratégiques ; des méthodes de prospection commerciale ; des procédés originaux ; des algorithmes ; la R&D, etc.. 

C’est-à-dire une somme considérable d’informations qui, auparvant, ne pouvaient faire l’objet d’aucune protection même au titre du droit de la propriété intellectuelle.

2nd critère : Elle revêt une valeur commerciale[3], effective ou potentielle, du fait de son caractère secret.

3ème critère : Elle fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.

Ce dernier critère revêt donc un caractère majeur et l’organisation interne dans l’entreprise, permettant de justifier de l’existence de ces « mesures de protection raisonnable » dès lors que l’on veut se prévaloir du secret des affaires, est fondamentale à cet égard. Elle doit, au surplus, pouvoir être démontrée.

Il y a, tout d’abord, la mise en place de moyens techniques.

Principalement pour rapporter la preuve de l’antériorité de ces informations au regard de leur utilisation illicite. Ils consistent à formaliser ces informations, quel qu’en soit le support, et utiliser les moyens désormais disponibles pour leur conférer une date qui ne puisse être remise en cause. De nombreux acteurs sur le marché permettent d’y parvenir notamment, désormais, avec l’outil Blockchain. Cela passe également par la sécurisation de tous les systèmes d’informations, le chiffrement des données protégées. Également par l’établissement d’une cartographie des secrets d’affaires appartenant à l’entreprise.

Il y a, ensuite, la mise en place de règles particulières pour les salariés de l’entreprise par l’insertion de clause de confidentialité dans les contrats de travail, la mise en œuvre d’une politique d’habilitation dans l’accès aux systèmes d’information, la rédaction d’une charte informatique, une sensibilisation permanente sur ces sujets, etc..

Il y a, enfin, la mise en œuvre d’une politique contractuelle avec les tiers et l’insertion systématique dans les contrats de clauses particulières de nature à conforter, vis-à-vis de ces derniers, le respect des obligations découlant de ce qui précède.
 

2. Le secret des affaires : à quoi ça sert ?

  • 2.1 Avant tout procès

Tout d’abord, cela confère à l’entreprise une protection - qui n’est pas limitée dans le temps - de tout ou partie de son patrimoine informationnel. Elle ne cesse que « si les informations en cause ont entre-temps cessé de constituer un secret des affaires ou sont devenues aisément accessibles ». C’est un avantage indéniable.

Ensuite, il permet de considérer que l’atteinte au secret des affaires peut être constituée lorsqu’elle résulte (i) d’une obtention illicite ou (ii) d’une utilisation ou divulgation illicite.
 
  1. L’obtention illicite
Elle résulte d’un accès non autorisé (i.e sans le consentement de son détenteur légitime) au secret des affaires ou d’un comportement déloyal.
 
  1. L’utilisation ou la divulgation illicite
Dès lors que le secret a été obtenu de façon illicite, l’utilisation ou la divulgation d’un secret des affaires est prohibée directement à l’égard de l’auteur de tels agissements mais également à l’égard d’agissements de tiers qui le savaient ou auraient dus le savoir.
 
  • 2.2 Dans le cadre d’un procès

Toute atteinte au secret des affaires engage la responsabilité civile de son auteur et offre la possibilité, outre l’octroi de dommages et intérêts, d’agir en vue d’empêcher ou de faire cesser une telle atteinte.

Il peut ainsi être envisagé des actions relatives à la prévention ou la cessation d’une atteinte au secret des affaires et, par exemple, être ordonné le retrait des circuits commerciaux des produits illicites[4], leur confiscation, le tout aux frais de l’auteur de l’atteinte.

En clair, toute mesure proportionnée de nature à empêcher ou faire cesser une telle atteinte, toutes mesures provisoires et conservatoires qui peuvent être demandées sur requête ou en référé.

Les dommages et intérêts qui sont réclamés correspondent au préjudice « effectivement subi » et la juridiction saisie peut ordonner toute mesure de publicité qu’elle juge utile.

Enfin et sans entrer dans le détail, des règles existent désormais pour permettre à une partie, à l’occasion d’un procès, de solliciter ou prendre un certain nombre de mesures visant à se protéger de toute atteinte au secret des affaires qui pourrait résulter de la communication de ses pièces aux débats judiciaires.


Il est notable de remarquer, dans le contentieux administratif, qu’un Décret du 30 décembre 2019 a introduit un nouveau type de référé en contentieux administratif : le « référé secret des affaires » qui offre au juge des référés administratif le droit d’appliquer l’ensemble des mesures mentionnées à l’art R 152-1 du code de commerce. Le Juge du fond est doté de pouvoirs similaires.

Pour conclure, force est de constater que la loi du 30 juillet 2018 sur la protection du secret des affaires offre un certain nombre d’outils très utiles dont la mise en œuvre s’adapte à toutes les tailles d’entreprises.

Montpellier, le 31 janvier 2022.
 
 
[1] L n° 2018-670 du 30 juillet 2018
[2] Directive n° 2016/943 du 8 juin 2016
[3] Le mot économique eut été préférable.
[4] Comme résultant d’une atteinte au secret des affaires

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